Siècle de changements, après plus de quatre cent cinquante années passées en Principauté de Liège, la Compagnie va connaitre trois nouvelles nationalités successives.
Malgré cela, nous constatons l’apparition d’un sentiment nouveau chez les membres : tout au long du siècle la détermination à conserver l’existence de la compagnie devient primordiale.
Après l’échec de la Révolution liégeoise puis l’arrivée des Français, la Compagnie dut cesser toute activité : elle fut réorganisée après l’avènement de Napoléon.
1803.
Pierre-Ursmar Philippin maire de la commune de Visé depuis novembre 1802, intervient vigoureusement en faveur des compagnies des Arbalétriers & des Arquebusiers parce que la force armée, sur l’ordre du général Legrand, était intervenue contre leur présence dans un cortège religieux.
Le 21 juin1803, il envoie au Préfet (du département de l’Ourthe à Liège) la copie de la lettre qu’il avait expédiée au général pour obtenir « la levée de l’obstacle qu’il avait mis à la marche des bourgeois. » Sa démarche est couronnée de succès !
Les Arbalétriers célèbrent la Fête-Dieu, assistent de nouveau aux offices et défilent dans la procession.
Vingt-trois nouveaux confrères prêtent serment.
On crée de nouveaux grades colonel, lieutenant-colonel, major…
Dans cette conjoncture favorable, la venue de Napoléon Bonaparte, le lundi 1er août 1803, suscite l’enthousiasme de la population.
Le Premier Consul devait en effet passer par le territoire de Visé en faisant sa « Joyeuse Entrée » par Devant-le-Pont.
« A cette occasion, le maire fit dresser un arc de triomphe en face de la barrière (coin de la rue des Ecoles).
Un vin d’honneur & une collation furent servis.
Jean Janvier, Douin & Protin (tous trois arbalétriers) qui chargèrent & tirèrent des boites d’artifice perçurent 18 francs & Arnold Jaminet, 6 francs pour sonner les cloches.
La commune déboursa encore 15 francs pour le rafraichissement des maires de Lixhe, Haccourt, Hermalle & Visé, pendant les deux jours de l’attente du premier Consul, avec les membres du Conseil qui ont voulu s’y joindre. »
Napoléon, Premier Consul
Le 6 novembre 1803, La Compagnie des arbalétriers s’assemble dans une salle du couvent des Récollets pour y procéder au remplacement du roi décédé, Martin Paulus dit Georges 1er , intronisé quelques mois plus tôt.
L’élu fut Erasme-Joseph Piron.
« Brave & ancien arbalétrier, entré dans nos rangs le 18 septembre 1780 avec la charge d’enseigne. Il est proclamé Roi de l’illustre corporation des arbalétriers, Grand-Duc & Prince commandeur du Grand Ordre de Saint-Georges & de l’Arbalète et on lui impose le nom de Georges II »
Ce n’est plus un Roy du tir annuel mais un notable de la gilde nommé à vie qui portera l’antique collier du Roy.
Erasme Piron portant le collier du Roy, l’épée & le bicorne, très à la mode à l’époque !
1807.
Jadis, les deux compagnies défilaient de concert pour la Fête-Dieu.
Un incident éclata en pleine église à propos d’un changement de place.
Le 1 juin 1807, le Préfet demanda un compte-rendu détaillé de la « rixe très sérieuse survenue dans l’église de Visé entre les deux confréries & autres individus qui étaient armés. »
Le 3 juin suivant (Fonds Français, Préfecture, L372), le Maire répond que le jour de la Fête-Dieu, le 31 mai avant-midi, les deux compagnie ont accompagné la procession puis elles se sont rendues aux vêpres « avec leurs armes & je fus surpris de voir qu’au moment de sortir, la compagnie dite Arquebusiers ferma à celle dite Arbalétriers, le passage par la grande nef, dans laquelle les Arquebusiers se sont placés depuis que ces compagnies ont été tolérées et par laquelle les Arbalétriers passaient sans obstacle pour sortir par le milieu de la Compagnie des Arquebusiers. Voyant cet obstacle, j’approchai d’eux et leur représentai combien il était indécent d’élever une difficulté de cette espèce. » Ne pouvant obtenir satisfaction des Arquebusiers, le Maire explique au Préfet qu’il envoya une personne demander à la gendarmerie d’intervenir dans l’église.
Et « sans qu’il soit donné le moindre coup, la rixe cessa lorsqu’on me vit entouré de la force armée. » Pour les punir, le Maire interdit aux Compagnies de « se montrer en arme comme c’était la coutume. » Quant à l’autorisation qu’il leur avait donnée de tirer à l’arquebuse le lundi 1er juin, il ordonna « que ces Compagnies fassent porter les armes en masse aux lieux où le tir à l’arquebuse a lieu, il a été suivi des danses et, à quelques grincement de dents près, il n’y a pas lieu de se plaindre. »
En terminant son rapport, le Maire constate que l’attitude des Arquebusiers fut « une agression contre les anciens usages ».
Depuis lors, les Arbalétriers se réunirent le lundi de la Fête Dieu, et les Arquebusiers le mardi.
Le Roi Guillaume 1er des Pays-Bas rend obligatoire le système métrique et interdit toutes les anciennes mesures.
Ce fut un changement radical pour nos prédécesseurs !
Guillaume 1er en 1819
Nous conservons dans notre musée, plusieurs brocs d’un litre munis du poinçon officiel de cette époque.
C’est aussi sous ce roi, en 1826 qu’une loi fondamentale réorganise complètement la compagnie (74 articles) et notamment l’ordre chevaleresque de Saint-Georges & de l’arbalète.
En voici les principales médailles :
1818.
Après que la paix eut rétabli l’équilibre européen, saisie d’une nouvelle ardeur, la Compagnie se réorganise tout à fait militairement. On nomme un corps de Lanciers (20 membres) & un de Carabiniers (23 membres), un Général et des Officiers d’état-major…
On crée des nouveaux uniformes, chacun s’habille à ses frais.
1830.
La révolution belge vient tout bouleverser. L’attirail militaire rentre définitivement à l’arsenal.
1836.
Tous les arbalétriers, vieux & jeunes rassemblés, réorganisent la Compagnie d’une manière toute pacifique.
L’habit militaire cède la place à l’habit bourgeois et les fêtes reprennent comme autrefois en conservant le cachet des anciens usages.
La Compagnie compte environ 90 membres.
1848-1852.
Adoption d’un nouvel uniforme :
Les officiers portaient le pantalon bleu de ciel avec galons en argent, l’habit & le chapeau noirs de cérémonie.
Pourquoi le bleu ?
Parce que dans toute l’iconographie, le bleu était la couleur de saint Georges, tandis que celle de saint Martin était le rouge, allusion au manteau rouge des légionnaires romains.
1861.
Le nombre des membres s’accroit sensiblement. Dans plusieurs villes de Belgique des sociétés d’arbalétriers remettent le tir à l’arbalète à l’honneur et organisent entre elles des concours.
Les arbalétriers visétois relancent le tir à l’arbalète et créent une section nommée « Société de tir à l’Arbalète » qui deviendra l’actuelle « Section de tir
Uniformes en 1818 et 1848, Dessin de Joseph Ronday Senior
1864.
Les Arbalétriers aménagent dans leur local un petit musée d’arbalètes de toutes les époques.
1881.
La compagnie participa à plusieurs expositions consacrées aux anciennes Compagnies et anciens Serments notamment à Liège, où elle remporta de hautes distinctions, ainsi qu’à Bruxelles en 1888. Elle se signala de même au concours d’Anvers en 1895.
Le Roy, Louis Perot, est coiffé d’un chapeau haut de forme.
Il est entouré de ses deux aides de camp portant chacun une pique.
1884.
Un nouvel incident se produit : il oppose le Doyen de Visé et le chef de l’harmonie, Arnold Jaminet.
La Compagnie s’abstint d’assister aux offices religieux jusqu’en 1886, date à laquelle, le conflit aplani, tout rentra dans l’ordre.
1894.
Conscients de sa renommée et de la richesse de son passé, la gilde sollicite la faveur d’être érigée en société royale sous le patronage de Sa Majesté Léopold II.
Le 23 mai, c’est chose faite.
Cette date importante fut pour les Visétois, une consécration des plus glorieuses.
M. Albert Thys, originaire de Dalhem était officier d’état-major de l’armée belge & officier d’ordonnance de Roi Léopold II.
Celui-ci, issu d’une ancienne famille d’arbalétriers visétois, favorisa, par la haute considération dont il jouissait auprès du Souverain la réalisation de cette entreprise.
1896.
Don par Sa Majesté le Roi Léopold II d’un magnifique drapeau aux couleurs nationales.
Le Général Albert Thys. Portrait offert par la famille au musée des Arbalétriers.
1897.
Installation dans la Collégiale de Visé, du magnifique vitrail dédié à saint- Georges, vitrail exécuté par le peintre-verrier de Contini, et offert à l’Eglise par souscription des Arbalétriers.
Le vitrail survécut miraculeusement à l’incendie de l’édifice le 10 août 1914.
Les dignitaires avec le drapeau de la Compagnie :
à gauche le drapeau Mignon (nom du donateur)
à droite la cornette avec les armoiries du prince-évêque de Velbruck (1772).